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Parlons Harka : le phénomène de l’immigration clandestine en Tunisie

Parlons Harka : le phénomène de l’immigration clandestine en Tunisie

Parlons Harka : le phénomène de l’immigration clandestine en Tunisie

L’immigration irrégulière est un phénomène qui existait depuis quelque temps en Tunisie mais qui s’est accentué au cours des dernières années au point où il est devenu un centre d’intérêt public. 

La situation aujourd’hui :

Il est compliqué de chiffrer le nombre exact de migrants irréguliers vu leur statut non-officiel mais nous pouvons faire l’estimation annuelle de ce chiffre. Selon le rapport du FTDES de 2021, on compte 16413 migrants irréguliers et 25657 migrants interceptés par la police au cours du chemin sur l’année 2021 contre 13376 et 13466 respectivement en 2020. Seulement 44,6% des migrants sont tunisiens tandis que 56,4% viennent d’autres pays majoritairement de l’Afrique subsaharienne montrant ainsi le « Transit vers L’Europe » qu’est devenu la Tunisie. 

Le mix des profils des migrants est le suivant : 79% sont des hommes, 13% sont des mineurs non-accompagnés, 4% mineurs sont accompagnés et 4% sont des femmes. De manière naturelle, les points de départ sont les villes côtières avec environ 41% des opérations qui partent de Sfax, 14% de Mahdia et 12,5% de Nabeul. Les points d’arrivée sont l’Italie et Malte avec 96% des « Ch9oufa » qui arrivent dans ces pays.

La question aux millions réponses : pourquoi les gens partent-ils ? 

Dresser le problème à ses racines commence par comprendre les raisons qui poussent un mineur de 16 ans par exemple à prendre son sac à dos et débarquer en « ch9af » à ses risques et périls. Allons-y : 

  • Pauvreté et manque d’éducation :  

Difficile de dissocier ces facteurs quand il s’agit des causes de l’immigration irrégulière. En effet, la pauvreté est souvent à l’origine de l’abandon de l’école à très jeune âge pour travailler et aider à faire bouillir la marmite. Les difficultés financières, parfois très pénibles, que vivent une partie de ces gens provoquent un sentiment de désespoir au bout d’un moment. Le manque d’éducation vient rajouter une couche lorsqu’on commence à penser que fuir le pays « en ch9af » serait la solution pour s’enrichir. Cela va encore plus loin : certaines familles voient l “Harka” aujourd’hui comme un investissement à long-terme. On donne toute l’épargne de la famille au fils pour qu’il puisse payer sa place dans un ch9af en espérant qu’il enverra de l’argent quelque années plus tard quand les choses « iront mieux ». 

  • Image faussement paradisiaque de la diaspora :

Elle commence à se développer lorsqu’on voit à jeune âge Tonton, immigré irrégulier il y a 15 ans, qui revient chaque été de l’Italie avec une belle voiture, bien habillé, cadeaux pour tous… Illusion Iceberg presque parfaite ! La réalité est malheureusement différente. On pense que c’est le paradis garanti alors que ce sont les portes de l’enfer qui attendront les nouveaux arrivants d’abord. La saison 2 du feuilleton tunisien « Harka » est une bonne illustration de ce point. 

  • Absence du lien avec l’Etat dans les zones rurales :

Les villes côtières sont les points de départ majeurs. Pour autant, ce ne sont pas les habitants de ces villes qui partent le plus. Au contraire même ! Dans certaines zones rurales, le seul lien avec la Tunisie est administratif. Le sentiment d’appartenance est atténué à cause du quotidien vécu qui rappelle à ces gens l’abandon. Pas de transport public, pas d’école à proximité, pas les moindres infrastructures et nécessités de vie. La situation difficile crée souvent chez eux une indignation qui se transforme rapidement en une envie brûlante de quitter le pays.

  • Absence d’un vrai mécanisme de réintégration :

La réintégration des immigrés interceptés est très importante faute de quoi ils essaieront de nouveau. Voyant ceci comme un échec, on pourrait même penser que sans accompagnement, ils seront plus déterminés que jamais à quitter le pays. Cependant, on commence à observer des efforts sur ce sujet ces dernières années. 

Des efforts pour la prévention de ce phénomène : lueur d’espoir ?  

Aucun dispositif gouvernemental officiel n’a été recensé en Tunisie à l’écriture de cet article. En revanche, il y a un appui pour soutenir les initiatives de prévention. L’Organisation Internationale pour les Migrations OIM est une agence intergouvernementale faisant partie du système des Nations Unies et présente en Tunisie depuis 2001. Depuis son établissement, L’OIM traite tous les sujets en lien avec la migration, notamment la protection des migrants vulnérables, l’assistance des migrants et rescapés en mer et la prévention des risques de la migration irrégulière. Elle travaille en étroite collaboration avec les ministères du gouvernement tunisien : le ministère des Affaires Sociales, le ministère de l’Intérieur, le ministère de la Formation professionnelle et de l’Emploi, le ministère des Affaires Étrangères,… 

Helma : un projet à méditer :

Financé par le Ministère Italien des Affaires étrangères et de la Coopération internationale et mis en place par l’OIM, Helma est un projet qui cible les jeunes vulnérables, c’est-à-dire à risque de migration irrégulière, dans les gouvernorats de Sfax et Mahdia. Le projet vise à offrir à ces personnes des alternatives concrètes via des initiatives de formation de toute nature : Robotique, Pâtisserie, Soudure, Workshops, Soft Skills et plein d’autres sujets qui satisferont les goûts de nos jeunes. La majorité de ces formations sont faites dans des maisons de jeunes et des écoles, des institutions de l’État pour essayer de forger le lien de ces jeunes avec leur pays et instaurer le sentiment d’appartenance.

Le clap de fin :

L’immigration irrégulière n’est sûrement pas la solution. Elle a des conséquences irréversibles sur les personnes, le pays d’origine ainsi que le pays d’accueil. Certes, nous ne pouvons rien y faire une fois que les gens ont pris le “Ch9af” mais nous pouvons faire tous les efforts pour leur montrer le vrai visage de la vie clandestine, leur offrir des conditions meilleures et des alternatives concrètes. En attendant, une question simple que vous pouvez déjà y réfléchir : Vaut-il vraiment le coup de quitter la Tunisie d’une manière si mortelle et impitoyable ? 

On se quitte sur des paroles extraites de la chanson Ghneya lik 

مهما دارت ليام تنسى يا بلادي المحاين نرجعلك ديما ديما و نفرفط فارح

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Mohamed Ali Derbel

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